La démocratie peut-elle se passer de fictions ?
coordonné par Anne Simonin et Sandra Travers de Faultrier
En droit, la fiction est un procédé qui a mauvaise presse. Jeremy Bentham, dans sa Théorie des fictions (1814-1815), dénonçait la fiction juridique comme une « imposture », une « usurpation » du législateur : « Ce que vous avez fait avec la fiction, pourriez-vous ou non, l’avoir fait sans la fiction ? Si non, votre fiction est un mensonge inique ; si oui, un mensonge fou. Tel est le dilemme. Homme de loi ! essaye d’en sortir si tu peux ».
De leur côté, François Gény, dans les années 1920, Charles Perelman, dans les années 1960, furent les deux grands re-légitimateurs de la fiction comme technique juridique indispensable, imposée par l’infirmité de l’esprit humain à créer des concepts nouveaux. La fiction en tant que « moyen économique de transformation du droit » (Yan Thomas), est bien connue des juristes.
Peut-on interroger ce procédé non plus du seul point de vue du droit, mais en faisant appel aux acquis du mouvement « Droit et Littérature » qui, depuis les années 1970, aux États-Unis, a renouvelé en profondeur la question de l’interprétation ?
Et si la fiction, littéraire, philosophique, ou juridique, était fondamentalement la voie démocratique de la révolution ?